Après ces 5 nuits fantastiques dans les montagnes du Sri Lanka, nous décidons de prendre un train de nuit pour nous rendre à Jaffna, ville à l’extrême nord du pays. Il paraît que cette partie du pays n’est pas encore très touristique du fait de la dernière guerre, mais qu’il est désormais possible de s’y rendre facilement.

Nous sommes obligés de prendre deux trains pour aller à Jaffna. De Kandy à Polgahawella, comptez 1h30 de train environ. Ce train était aussi blindé en 2nde classe que notre premier train depuis Colombo en 3ème ! Beaucoup de Sri Lankais revenaient sur la capitale après un week end passé à Kandy. Nous avons pu échanger avec un jeune couple de Colombo et de notre âge qui venait justement se faire un weekend en amoureux. Le gars était sympa et parlait bien anglais. David s’en serait sûrement fait un pote si on était allé à Colombo. Après ce court mais intense trajet comprimé et pour patienter lors des 3h d’escales qui nous attendent, nous sautons dans un tuktuk pour aller prendre une petite bière dans un resto-bar local. Peu de touristes doivent passer dans ce coin.
Nous sommes partis à 22h de Polgahawela et avons mis 7h30 de train pour Jaffna. Bien sûr il n’y avait pas de train couchette et nous avons passé la nuit sur des fauteuils à l’assise inexistante, effacée par les dizaines d’années de service. Mais pour éviter d’être serré, cette fois ci nous avons opté pour une 2nde classe réservée (4€/pers), donc avec place assise assurée pour chacun : faut savoir se faire plaisir de temps en temps 😉 !

Ce trajet est finalement passé assez vite, et malgré quelques appréhensions au départ du fait de quelques mises en garde sur la sécurité de nos affaires dans le train. Nous n’avions personne devant nous, nous pouvions donc étaler nos jambes sur la paroi de devant et avoir nos affaires avec nous 😀

Jaffna côté mer ou vis ma vie de pêcheur

Nous sommes arrivés bien fracassés de cette petite aventure vers 6h du matin, au petit jour. Notre réservation de logement n’étant pas encore confirmée, nous décidons de marcher avec nos affaires jusqu’à la mer, à 1,5 km de la gare. Nous pensons prendre un petit café sur la route mais sans succès. En chemin, nous sommes spectateurs du lever des habitants. Ils ne doivent pas avoir l’eau courante car il font leur toilette dans la rue avec les fontaines/puits qu’il y a devant chez eux. Nous passons à travers de nombreuses rues. La vétusté des habitations et l’habillement semblent témoigner d’un niveau de pauvreté plus important que ce dont nous avons pu avoir l’impression ailleurs. Ils sont d’apparence un peu moins souriants que dans le sud touristique. Rappelons que la grande majorité de la population est ici Tamoul (la même que dans l’Inde du sud). Nous pensions voir une majorité d’hindous mais voyons beaucoup d’églises. Nous apprendrons plus tard que la côte est dominée par les chrétiens qui sont tous des pêcheurs.

Une fois à la mer nous remontons la côte, toujours dans l’espoir d’un café. Nous passons devant nombre de pêcheurs qui s’affairent avec leurs pêches de la nuit. Les regards sont différents. Nous sentons qu’il sont peu habitués aux touristes. Mais après avoir demandé plusieurs fois où boire un café, et alors que nous commencions à fatiguer et abandonner, des pêcheurs nous ont proposé de venir en boire chez eux. Mais oui !

Ce fût une matinée fantastique, avec des personnes curieuses, ouvertes, qui ont l’envie de rencontres et de partage…
Nous avons passé la matinée chez eux, de 7h à 14h. Même après une quasi nuit blanche nous étions pleins d’énergie. Au départ nous étions un peu gênés, peut être eux aussi car ils s’assuraient de nous recevoir au mieux. Niveau d’anglais assez bas, nous mettons beaucoup de temps pour communiquer mais on se débrouille et c’est très chouette ainsi ! Nous imaginer les uns et les autres si étrangers et pourtant faire preuve d’autant d’attention et d’effort pour entrer dans un partage, s’en est émouvant ! Mais aucun de nous n’est parvenu à retenir les prénoms des uns et des autres… Après nous avoir offert un “petit” déjeuner, le pêcheur chez qui nous sommes doit partir vendre la pêche de la nuit au marché. De notre côté nous partons avec deux de ses amis qui sont aussi ses collègues directs de pêche sur le même bateau pour une balade exotique où nous sommes scrutés de la tête aux pieds tout du long. On ne leur en veut pas, on s’ébahit devant tout et il faut dire que l’on dénote vraiment ! Dans les rues, on peut admirer les étalages de poissons séchés, les sceaux de crabes et de crevettes à gogos… la pêche est leur ressource. Et pourtant, il y a des tas de plastiques partout, flottants. Nous voyons plusieurs personnes jeter canettes et plastiques à la mer sans questionnement. La conscience écologique est loin de leurs préoccupations. Au retour, nous jouons avec eux à une sorte de pallet/billard puis tentons de faire un Mind (merci Lisa pour ce cadeau de voyage ;-)), mais l’explication des règles du jeu n’ont pas été aisées, et ils ne semblaient du coup pas hyper emballés !!! Une fois que l’on a accepté qu’ils nous offrent le déjeuner, et quand le menu est décidé, notre ami nous a fait rêver (et déchanter) en nous amenant avec lui relever ces casiers avec sa barque où les rames sont de gros et longs morceaux de roseaux. Moments magiques (et désenchantant), nous voyons en bateau des aigles et deux genre de pélicans sri lankais, et les couleurs des bateaux sont sublimes. Il relève plusieurs casiers, pour au final ne garder que 4-5 gros crabes et quelques petits (qui seront pour nous ;-)). Pour ce bilan, une trentaine de petits poissons à moitié morts seront rejetés à la mer (dont on perçoit le gasoil à la surface) avec morceaux de plastiques et autres déchets, quelques crabes volontairement “abîmés/mutilés” sur leur pince juste pour nous montrer… Comportements qui heurtent un peu la sensibilité des bobos français que nous sommes.

La dernière partie de cette journée est la plus drôle : il a invité des amis pour boire des coups. Ce sont des amis d’enfance qui ont en moyenne notre âge avec une bien plus grosse descente 😉 Ils nous invitent à déjeuner les crabes de la matinée et des morceaux de calamars revenus au lait de cocos préparés par madame (oui ici les hommes ne font pas à manger). Pour les remercier nous achetons 2 bouteilles d’arak, leur alcool local de palmier. L’un d’eux nous dit que ça rend fou quand tu n’es pas habitué ;-). Pour nous ca ne sera que 3 canettes de biere pour deux. Ils descendront les 2 bouteilles… La timidité de la matinée est terminée. Nous nous trouvons à chanter, jouer de la musique sur des cubis en plastique, danser et bien rigoler. Bref on a partagé une cuite entre bon copains, ça a rappelé à David les soirées épicurvins ;-). Ils nous réinvitent pour le soir à manger et à dormir, mais la fatigue et le besoin de douche auront raison de nous, d’autant que nous commencions à sentir chez eux les effets d’un alcool, comment dire… affectueux !

Le tour de la péninsule en vélo

Pour cela, nous louons deux vélos. La mauvaise estimation des distances, qui plus sous un soleil de plomb, aura raison de nous, c’est difficile et nous n’en ferons que la moitié ! Mais c’est une superbe balade que nous conseillons (peut être plus en scooter par contre) ! Cela rappelle des paysages de Camargue, avec beaucoup d’oiseaux, des aigles… Nous traversons pas mal de champs où les paysans nous saluent tous de très loin. Des chèvres rigolotes aux très longues oreilles font leur apparition et les gens dans les villages sont de nouveaux très souriants. Sur la route, en passant dans un village, nous entendons tout d’un coup un peu au loin beaucoup musique sortant d’un haut parleur. Nous décidons de nous approcher avec curiosité et découvrons un événement sportif dans une école primaire tamoul-hindouiste. Et oui, jusqu’à l’université, les écoles (gratuites et obligatoires) sont séparées par religion : Bouddhistes, Musulmans et Hindouistes. Cependant nous comprenons que l’enseignement spécifiquement religieux se fait quelques hiures le dimanche. Le niveau d’éducation reste bien sûr identique pour ces trois types d’écoles gérées par le gouvernement (info d’une discussion avec le professeur d’un lycée musulman à Jaffna). On approche timidement, les gens nous regardent également avec curiosité en se demandant ce que nous faisons là. Une jeune femme vêtu d’un joli sari nous approche, comme si elle nous connaissait, se présente comme chrétienne, demande si nous aussi, et nous fait s’asseoir. Nous comprendrons plus tard que nous étions à la place des invités VIP ! Sur notre gauche, il y a une quarantaine de femmes en sari qui attendent le “show” de leurs enfants. Il n’y a aucun homme, quand on pose la question on nous dit qu’ils sont au travail… Quelques minutes après, un cortège d’enfants entre, tambourins à la main pour escorter plusieurs personnes dont le ministre de l’éducation qui s’assoira à 2 chaises de nous. Nous restons environ une heure où nous pouvons discuter notre voisin qui se dit politicien/député, et avec le principal du collège qui est devant nous. On nous apporte à boire et à manger (contrairement au coin des mamans). Comme quoi dans la vie, la curiosité apporte toujours de belles rencontres 😉

Sur le retour, nous passons 30min dans un magasin où Capucine achète un beau Sari blanc. Les essayages avec les vendeurs/vendeuses étaient épiques et minutieux. Pas certain que nous arrivions à le remettre aussi bien une fois rentrés !! Dans les magasins il doit y avoir toujours 4 fois plus de vendeurs qu’un équivalent en France. Là ils étaient 5 dans une boutique de 10m2 ;-).

Un des meilleurs moments à Jaffna a été ensuite notre visite dans le temple Hindou de Nallur Kandaswamy Kovil. Nous sommes arrivés en pleine cérémonie, la première à laquelle nous assistions. C’était impressionnant. Le temple déjà était magnifique, autant par ses formes architecturales, ses peintures murales et ses icônes des différents dieux hindous. David doit enlever son T-shirt car les hommes doivent obligatoirement être torse nu, ce qui n’est pas pour lui déplaire ! Les hommes et les femmes forment souvent des files indiennes pour regarder les prêtres réaliser tout un tat de manipulations avec des bougies, des encens… Parfois ils poussent des cris en levant les bras. Pour agrémenter tout ça, un prêtre tambourine sur une caisse très grave, une femme entonne un chant envoûtant, et un musicien souffle dans une sorte de grande flute orientale dont nous n’avons pas le nom. L’ambiance est incroyable et difficile à décrire. Ce qui est sûr c’est que ça prend aux tripes !

Deft Island

Le lendemain nous décidons d’aller sur l’ile de Delt Island. Cette île est le lieu le plus proche du continent indien qui n’est qu’à quelques kilomètres. Nous prenons cette fois-ci un scooter qui nous permettra de finir notre itinéraire voulu ;-). La route pour prendre le bateau est magnifique, nous traversons plusieurs grands ponts et digues réalisées pour relier différentes îles. Nous arrivons pile poil à l’heure (comme souvent) et découvrons le ferry qui est en fait un vieux rafiot où les gens sont entassés dans les cales comme dans un bus. Ce voyage est une fois de plus épique. Il y a une quinzaine d’étudiantes musulmanes avec leurs professeurs. Déjà qu’elles rient facilement en nous observant, nous ne pouvons nous empêcher de les faire rire en dansant sur place sur les musiques indiennes diffusées dans le bateau. Nous pouvons discuter avec les professeurs (de religion, de géographie, d’économie, de langues tamoule et anglaise) qui parlent un anglais impeccable. Nous apprenons que dans le pays, il y a seulement 30% d’étudiants qui ont le bac et seulement 10% qui vont à l’université. L’université est publique et le gouvernement assure un travail à tous les diplômés, limitant donc leur nombre, possiblement faute de moyens.
L’île de Delft n’est pas folle mais la balade en tuk-tuk pour en faire le tour reste sympa. Cette île a eu un passé plus riche que son actualité, en témoigne les centaines de kms de petites murailles bâties à l’aide de ce que l’on prend pour des coraux fossilisés, de vieilles ruines, et des arbres-plantes qui en vampirisent d’autres tels des aliens. Nous croisons des champs de vaches et de chevaux sauvages. Nous ré-assistons par hasard à une cérémonie hindou. Le retour sur le bateau est plus difficile, il y a beaucoup de houle alors ça demande des exercices de respiration digne d’une préparation à un accouchement ! Nous passons ce voyage à côté d’un militaire avec qui nous papotons.

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